Amsterdam, le 7 mai 2019. Aujourd’hui, le tribunal de La Haye a statué dans le cadre de la procédure de référé engagée par Sea-Watch contre l’Etat. Selon le tribunal, le ministre ne peut imposer le changement de politique pour les navires des ONG comme Sea-Watch sans une période de transition. La Cour parle d’une mauvaise administration, ce qui constitue d’ailleurs une violation du principe de sécurité juridique
La Cour a statué que le ministre, lorsqu’il a promulgué le règlement, n’a pas suffisamment tenu compte des intérêts légitimes de Sea-Watch et a donc agi avec négligence. La Cour a stipulé :
« La promulgation du règlement doit être faite avec un soin certain. Ce faisant, il convient notamment de tenir compte des attentes suscitées au cours de la phase préliminaire, d’agir de manière cohérente, de tenir compte de tous les intérêts en jeu et de permettre aux parties concernées pour lesquelles le règlement s’applique, de déterminer sur la base du texte du règlement, ce à quoi elles doivent se conformer et d’être ainsi claires, reconnaissables et prévisibles. De l’avis de la juridiction dans le cadre de la procédure de référé, ces aspects font tellement défaut qu’il y a lieu de conclure que le règlement a été établi en violation des principes de bonne administration, et plus particulièrement du principe de sécurité juridique. Il s’agit donc d’une atteinte illicite au droit de propriété, car l’ingérence n’est pas prévue par la loi. »
En outre, la Cour s’est étonnée de l’apparente réticence du ministre à communiquer un rapport d’inspection à l’ONG et a remis en question son raisonnement. En effet, en déclarant le régime immédiatement applicable au navire, celui-ci s’est trouvé en situation d’attente du nouveau règlement. Le tribunal a maintenant statué que le Sea-Watch 3 n’a pas à se conformer aux règlements tel que publiés jusqu’au 15 août 2019 et est donc autorisé à naviguer d’ici là. Il ordonne à l’État, en consultation avec Sea-Watch, de parvenir à un règlement qui tienne suffisamment compte des intérêts des ONG et qui respecte le principe de sécurité juridique.
Néanmoins, Sea-Watch reste préoccupé : « D’une part, nous sommes heureux que le tribunal ait statué en notre faveur et que le ministre ait été réprimandé ; d’autre part, nous sommes très préoccupés par l’ampleur des efforts des gouvernements dans la lutte contre les organisations humanitaires qui s’engagent à sauver des vies humaines », déclare Anne Dekker, représentante de Sea-Watch Netherlands.
Contexte général
Le 26 septembre 2018, le ministre de l’Infrastructure et des Travaux publics a introduit un changement de politique pour une catégorie de navires battant pavillon néerlandais, les bateaux dits de plaisance. Pour tous les autres navires concernés par cette nouvelle réglementation, le contenu des nouvelles règles est en cours d’élaboration. De plus, le ministre a promis de leur accorder une période de transition d’environ un an pour se conformer aux nouvelles règles.
Le 2 avril 2019, le ministre a édicté une nouvelle réglementation concernant uniquement les navires » accueillant systématiquement à bord des personnes secourues en mer « , sans accorder aux navires en question une période transitoire. D’après les explications du ministre sur ce régime, Sea-Watch 3 était le seul navire couvert par le nouveau régime et, par conséquent, n’était plus en mesure de fonctionner. Pour cette raison, nous avons contesté la validité de ce régime dans le cadre d’une procédure de mesures provisoires. L’arrêt d’aujourd’hui confirme que le régime ne peut être maintenu tel quel et que Sea-Watch doit bénéficier d’une période transitoire afin de se conformer aux nouvelles règles.