Jakob, explique-nous s’il te plaît ce qui t’a incité à devenir actif chez Sea-Watch.
Je suivais déjà depuis un moment, par les media, les embarcations pneumatiques trop remplis qui partaient de la Libye et qui se retrouvent en détresse. J’ai toujours trouvé que c’était une situation désastreuse. J’étais enthousiaste à l’idée qu’il y a des gens qui achètent tout simplement un bateau, partent et sauvent des personnes. J’avais alors pendant un moment en tête l’idée de m’engager. Car je viens du milieu de la mer et je peux ainsi apporter mon savoir-faire pour une bonne cause. A un moment, il s’est avéré que j’ai pu participer chez Sea-Watch. Et que cela dure maintenant si longtemps est aussi une petite surprise pour moi, mais bien sûr une très bonne.
Explique-nous, s’il te plaît, ton travail pendant une mission.
Il y a toujours quelqu’un dans la salle des machines, 24 heures sur 24. Nous sommes trois machinistes et faisons chaque fois deux quarts de quatre heures. En mode « garde », on surveille la totalité des machines, on contrôle le niveau d’huile, les températures, on note les niveaux pour des analyses – on doit avoir les yeux, les oreilles et le nez ouvert pour remarquer toute de suite, si quelque chose ne tourne pas rond ! En plus, on doit garder le contact avec la base sur terre et informer combien de carburant ou d’eau fraîche ils nous restent ou quelles pièces de rechange doivent probablement être commandées, ou bien si on a eu un dommage plus important. S’il y a des problèmes moins graves, on est quelque fois occupé le reste de la journée à effectuer les réparations. Des bagatelles comme une fuite arrivent quasiment tous les jours sur un bateau comme le Sea-Watch 3 qui a plus que 40 ans. La charge de travail pour le matériel en mer est évidemment énorme.
Y a-t-il des moments de tes missions de Sea-Watch, qui sont restées particulièrement dans tes souvenirs ?
Plusieurs. Beaucoup. Le plus dur que j’ai vu jusqu’à présent était en novembre. Nous avons récupéré un garçon de 2 ans à bord, j‘ai aidé moi-même à le monter sur le bateau et je n’ai pas remarqué tout de suite qu’il allait si mal. A bord, nous avons tenté pendant deux heures de le réanimer, mais nous n’avons pas réussi. L’enfant s‘est retrouvé encore trois jours chez nous, dans le bac à glace, et je devais passer devant tous les jours. Cela m’a travaillé très longtemps. Cependant il y a aussi beaucoup de moments positifs. On rencontre ici beaucoup de personnes qui ont envie de créer quelque chose, qui se serre les coudes– on ne trouve nulle part une si petite « proportion de cons » qu’ici ! Cela m’impressionne à chaque fois et c’est toujours un plaisir de travailler avec les différents équipages.
Actuellement, le Sea-Watch 3 est dans le chantier naval, depuis deux semaines en cale sèche. Qu’est-ce qui s’y passe ?
D’abord, toute la partie sous-eau du bateau a été nettoyée avec des nettoyants de haute pression, et maintenant nous allons mettre une nouvelle couche de peinture. En outre, un bateau de cette taille est généralement utilisé en tant que navire marchand qui navigue normalement dans un but commercial. De tels bateaux sont toujours listé dans des sociétés de classification. Cette classification, on peut l’imaginer comme l’examen de contrôle technique d’une voiture. Les experts viennent à bord et contrôlent certaines choses à bord, par exemple les citernes de ballast. Après avoir fait écouler l’eau, ces citernes doivent être nettoyées. Cela a occupé quatre personnes pendant trois à quatre jours. Une citerne de ballast est bien étroite, sombre, et pleine de résidus. Ramper là-dedans avec un nettoyant à haute pression ne fait pas partie des travaux les plus populaires ici. Pour cela, il n’y a moins de volontaires, moi aussi, j’y étais déjà là-dedans. En outre, les hélices sont démontées et on enlève beaucoup de rouille qui s’est accumulée au cours de l’année.
Et quels travaux impressionnent encore les marins et les amateurs de technique ?
La mesure de l’épaisseur de mur extérieur par sonde d’ultrason est en tout cas une chose très intéressante. Avec cela, on ne voudrait pas arriver au point où on doit ouvrir le revêtement extérieur et renouveler l’acier, car cela coûte immédiatement du temps et beaucoup d’argent. Au cours de la corrosion galvanique, la charge se déplace du métal le plus noble au métal plus commun. Le bateau se dissout ainsi pratiquement dans l’eau. Pour minimiser autant que possible cet effet, il y a des anodes, ce sont les pièces en zinc qui ont la taille d’un avant-bras et qui sont soudées à l’extérieur du bateau. Pour expliquer d’une manière simplifiée, ces anodes se dissolvent à la place du bateau. Actuellement, les anodes du Sea-Watch 3 ont complètement disparu et doivent être renouvelées complètement.
Le Sea-Watch 3 reste encore jusqu’à fin mars 2018 en Espagne dans le chantier naval. Ensuite elle repart pour des missions de sauvetage dans la Méditerranée du sud.